Interview : Benou, traducteur de la BD « L’enfer selon Poppy »

·

·

Plongée dans l’univers singulier de Poppy, l’arrivée en France de la BD “Poppy’s Inferno” soulève de passionnants enjeux autour de la traduction et de l’adaptation culturelle. Rebaptisée “L’Enfer selon Poppy”, cette œuvre atypique a franchi nos frontières grâce au travail minutieux de Benou, artiste et traducteur passionné ainsi que fin connaisseur Poppy. À travers cette interview, il revient sur les défis de la localisation, ses choix linguistiques, et les secrets du processus qui ont permis de restituer l’esprit troublant et l’énergie de l’original à un nouveau public francophone.

Hello Benjamin, est-ce que tu peux te présenter en quelques mots ? 

Hello Poppy France, je suis un scénariste qui opère sous le pseudonyme de Benou depuis plusieurs années, écrivant pour le moment de la BD Jeunesse. Comme je suis graphiste et photographe de profession, j’ai une sensibilité particulière pour la bande dessinée comme forme de narration car elle est visuelle, d’où ce choix d’écrire des BDs. Aujourd’hui je travaille sur des projets plus adultes et je réfléchis aussi à écrire autre chose que des scénarios, un roman peut-être.

Quand as-tu découvert Poppy ?

Ma découverte de Poppy est assez floue, mais il me semble l’avoir découverte juste après la sortie de I Disagree, début 2020 donc. Je dis floue car je me souviens d’une vidéo YouTube présentant l’album parmi une sélection de nouveautés, mais je n’arrive plus à remettre la main dessus. Ce qui est sûr c’est que c’est la pochette qui m’a tout de suite attiré. Et dès la première écoute, c’était un coup de foudre.

Qu’est-ce qui t’a marqué et touché chez elle ?

C’est sa colère je pense, et surtout la manière dont cette rage s’exprime. C’est à la fois doux et puissant, c’est complètement cathartique. Et ça s’entend !

Tu as traduit la BD Poppy’s Inferno, devenu L’enfer Selon Poppy en France. Peux-tu nous raconter ce cheminement ? 

C’est une histoire assez drôle que j’adore raconter. Lors de l’écriture de mes premières BDs, au détour d’une discussion avec Guillaume Féliu, qui éditait mes premiers livres, je lui parle de traduction car je suis curieux et il me demande un comics afin de m’expliquer comment les droits de traduction fonctionnent. Frustré de ne pas pouvoir lire ce comics sur Poppy, je lui en parle. Il s’est renseigné à l’époque sur les droits et avait apprécié la lecture… Et on n’en parle plus. Le temps passe, Guillaume commence à travailler pour une nouvelle structure, les éditions Blueman, et il me recontacte début janvier 2025 (plusieurs années plus tard donc !) pour me souhaiter une bonne année… Et m’annoncer qu’il venait d’acquérir les droits de traduction pour les comics co-écrits par Poppy, et qu’il aimerait que je sois impliqué d’une manière ou d’une autre dans la traduction. Il souhaitait avoir l’avis d’un fan, ça m’a beaucoup touché. Comme je suis à l’aise avec l’anglais, je lui ai donc proposé de faire toute la traduction en échange d’écrire une préface, car les thèmes de I Disagree et de Poppy’s Inferno me tiennent à cœur. Et j’en profite puisqu’on parle de cheminement, pour ce qui est du passage de “L’enfer DE Poppy” vers “L’enfer SELON Poppy”, je me suis rendu compte en cours de traduction que beaucoup de références religieuses étaient utilisées dans le texte, d’où ce titre encore plus prophétique et biblique que la version originale !

Quelles difficultés as-tu rencontré pour traduire cette bd ? 

C’est traduire les chansons qui était le plus difficile, car quand on connaît des paroles par cœur, même si on les comprend totalement c’est difficile de les imaginer dans une autre langue. De plus l’anglais est une langue plus “simple” que le français, je trouve qu’on dit en anglais beaucoup plus de choses en beaucoup moins de mots. Sans compter qu’on essaye de clarifier un maximum de choses à la traduction pour ne pas trahir les intentions originelles du récit. Mais c’était surtout un challenge très intéressant et enrichissant, ça nous rapproche de l’œuvre et ça permet d’y contribuer autrement que par la consommation.

Comment as-tu fait pour faciliter la diffusion de la bd en France ? 

Je suis plus ou moins à l’origine de l’idée de la traduction comme je l’expliquais dans une réponse précédente, mais c’est surtout le travail d’édition des éditions Blueman et de Guillaume qui ont facilité sa diffusion. Un élément non négligeable à prendre en compte est la présence au casting de Zoé Thorogood au dessin, qui est une étoile montante du comics américain, dans les ouvrages plus récents et personnels sont unanimement appréciés et salués en France comme dans le reste du monde. Présenter l’un de ses premiers ouvrages était un très bon argument pour la diffusion de ce comics relativement confidentiel en France. Ceci-dit tant mieux, car même au-delà des fans de Poppy, je crois que l’universalité des thèmes abordés font que cette histoire mérite d’être lue par tous !

As-tu eu des contacts avec elle ou son label ou des proches à elle pour traduire ce livre ? 

Aucun. Ce n’est pas plus mal je crois, j’aime bien cette aura mystérieuse qu’elle cultive et je respecte ça. J’espère juste que si Poppy lit un jour ma préface, elle ne la trouvera pas inutile ou ratée.

Quel est ton album préféré de Poppy et pourquoi ? 

C’est I Disagree, incontestablement. C’est sûrement l’un des albums que j’ai le plus écouté de ma vie et il est très haut dans mon classement de mes albums favoris tout genre confondu. Je dois confesser aussi un faible pour Flux, dont j’aime énormément les sonorités ! Mais I Disagree m’a accompagné dans des moments compliqués de ma vie donc il aura toujours mes faveurs.

Quelle est ta chanson préférée ? 

C’est une question sacrément difficile. Puisque j’ai déjà parlé de l’album I Disagree et que chaque chanson de cet album pourrait être ma préférée, je vais m’imposer une réponse hors I Disagree et opter pour Scary Mask, notamment car les masques me terrifient, c’est ma grande phobie. C’est presque cathartique pour moi une chanson qui renverse cette peur !

As-tu déjà assisté à ses concerts ? 

Oui ! Après l’annulation de son concert à l’Elysée Montmartre en 2022, j’avais peur de ne jamais la voir et j’étais donc enchanté quand la date à Lille, il y a quelques mois, a été annoncée : c’était improbable, mais totalement merveilleux. C’était totalement parfait, dans une salle assez petite, comme je l’avais rêvé depuis des années ! Certains fans étaient venus avec le comics dans l’espoir de le faire dédicacer par Poppy, c’était super touchant et je n’étais pas peu fier de dire que j’avais participé à la réalisation de ce livre.

As-tu des objets en rapport avec Poppy chez toi ? 

Je commence à avoir une petite collection d’objets, principalement du merch (t-shirt, hoodies, porte-clés, pins…) et ses albums qui trônent dans ma collection de vinyles. Et aussi, c’est mon péché mignon totalement débile… J’adore acheter toute sorte de choses parfum coquelicot car s’ils sont traduits en anglais sur leur packaging, il y a écrit “Poppy” dessus et ça en fait donc des mauvais bootlegs, je me lave les mains avec un “Poppy soap” par exemple et je trouve ça hilarant ! 

Poppy a un univers graphique qui ne laisse pas indifférent, qu’est-ce qui te plaît le plus ? 

J’aime justement, dans sa globalité, la cohérence de son univers graphique. J’adore tout particulièrement son merch, on sent que c’est très travaillé et toujours magnifique. 

Comment vois-tu l’évolution de Poppy sur ces 2 dernières années ? 

D’un très bon œil ! Et je suis impatient de continuer à suivre sa carrière.

As-tu d’autres projets en rapport avec Poppy ? 

Les éditions Blueman possèdent également les droits de Genesis 1, le premier comics co-écrit par Poppy. Il est possible que je travaille aussi à sa traduction…

Un dernier mot pour Poppy France ?

On se retrouve en mars 2026 à Paris, et d’ici là… Serrez les dents, lisez des BDs et écoutez Poppy !



Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *